On apprend des choses dans Le cataphile : que le sous-sol parisien est parcouru d'un réseau inextricable de galeries et de salles, de couloirs et de chatières, restes plus ou moins surveillés, plus ou moins entretenus des anciennes carrières souterraines ; que ce réseau, malgré les réglementations en vigueur, est lui-même parcouru, visité, exploré, exploité par des amateurs de toutes sortes : des « touristes », qui se contentent de descendre et de se retrouver dans les salles les plus fréquentées, mais aussi des « aventuriers », des « purs », des « rebelles », des «champions », des « ancarriphiles », bref les passionnés.
Mais Le cataphile n'est ni un manuel ni un guide. Rien ne dirige Mat en ses randonnées initiatiques et symboliques dans le labyrinthe en noir et blanc, si ce n'est la mystérieuse pulsion qui saisit parfois l'homme en quête d'absolu. Cet absolu est ici personnifié par Lucie, la jeune femme que Mat familiarise avec le domaine souterrain, et qui ira jusqu'à y disparaître. Alors Mat (celui qui ne peut que se trouver en position d'échec ? Celui qui n'a pas d'éclat, pas de transparence ?) n'aura qu'une obsession : retrouver Lucie (celle qui possède la lumière, qui est lumière) : au-delà du symbolisme des noms, c'est celui de la quête des origines qui sous-tend le récit : l'amour des profondeurs humides, le contact charnel avec la roche, l'enfouissement dans le giron étouffant de la terre-mère. La quête pour s'accomplir doit être affrontement des dangers, celui des hommes qui veulent tout contrôler (la bande de Loto et des ses sbires à crâne rasé), ou celui, tout en douceur, de Vlad le solitaire, qui hante le dédale comme un fantôme, comme un vampire à l'affût (rappel de l'ancien Vlad Tepes, figure historique du légendaire Dracula ?).
Au bout du roman, le lecteur n'est pas au bout du labyrinthe. Il se trouve encore un peu plus fasciné par ce monde de nuit et de lueurs, étroit et infini, silencieux et turbulent, immuable et changeant, matériel et fantasmatique. En suivant Mat dans ses pérégrinations, il pénètre chaque fois un peu plus dans les profondeurs mystérieuses de la vie humaine.
Jean-Pierre Longre
Tous droits réservés © Sit'art mag 2001
|
 |
|
|